Les éoliennes menacent les forêts suisses et la démocratie directe

«Forêt détruite à long terme, problème du démantèlement non résolu»

par Elias Vogt*

(14 novembre 2025) Dans environ deux ans, la population suisse se prononcera sur deux projets novateurs: l'«Initiative pour la protection des forêts» et l'«Initiative pour la protection des communes». Cela concerne la construction prévue de plus de 1000 grandes éoliennes dans le paysage suisse.

Elias Vogt. (Photo
Paysage Libre Suisse)

Protéger les forêts menacées

Sous prétexte de protéger le climat, de vastes zones forestières doivent actuellement être défrichées pour accueillir de nombreuses éoliennes. Rien que dans le canton de Zurich, une centaine d'éoliennes sont prévues, presque toutes au milieu de forêts précieuses. Pour chaque éolienne, il faudrait déboiser une superficie équivalente à un terrain de football afin de transporter puis d'assembler les composants gigantesques. Les éoliennes actuelles peuvent atteindre 250 mètres de haut, soit plus que n'importe quel autre bâtiment en Suisse. L'Initiative pour la protection des forêts vise à interdire le déboisement pour les éoliennes afin de protéger les forêts et les lisières de forêts en Suisse.

Garantir la démocratie directe

Afin d'imposer la construction d'éoliennes même contre la volonté de la population concernée, plusieurs cantons ont décidé ces derniers mois de supprimer le droit de regard de la population. Sous le prétexte d'«accélérer la procédure», les communes concernées ont été réduites au silence. L'Initiative pour la protection des communes souhaite que toutes les communes concernées puissent continuer à voter sur les éoliennes. Si une commune souhaite un parc éolien, elle doit pouvoir dire oui. Si elle n'en veut pas, elle a le droit de le refuser. Les votes doivent avoir lieu le plus tôt possible dans le processus de planification afin de clarifier la situation en temps utile.

Parc éolien de Gersbach dans la Forêt-Noire (Allemagne), en
construction en 2023. (Photo Paysage Libre Suisse)

Abandonner 150 ans de protection des forêts?

La protection de la démocratie et des forêts est en Suisse une évidence. La Loi sur la protection des forêts, qui interdit en principe le déboisement, est en vigueur depuis 1872. Cette loi a été la toute première loi sur la protection de la nature en Suisse. Elle a permis d'éviter la surexploitation de la ressource forestière.

Avec l'urbanisation croissante et le bétonnage de notre pays, la forêt est devenue le refuge le plus important pour les animaux et les plantes. Le déboisement permanent pour les éoliennes créerait des couloirs dans la forêt, ce qui réchaufferait la forêt, créerait des surfaces exposées au vent et chasserait de nombreux animaux sauvages et oiseaux.

Les éoliennes dans les forêts tuent un nombre particulièrement élevé d'oiseaux, de chauves-souris et d'insectes, car les pales des rotors traversent la forêt à une vitesse pouvant atteindre 400 km/h et détruisent tout ce qui se trouve sur leur passage. Les éoliennes dans les forêts sont un crime contre la nature!

Garantir le droit de regard des communes

Jusqu'à présent, le droit de regard des communes était également une évidence dans tout le pays. Dans tous les cantons, à l'exception de Soleure, Neuchâtel et Fribourg, la loi stipulait que les communes concernées devaient voter sur les parcs éoliens. Même dans les trois cantons faisant exception, les communes ou le canton ont trouvé des moyens de consulter la population ou de la faire voter indirectement sur un parc éolien. Mais ce droit de regard est un obstacle trop important pour de nombreux groupes énergétiques. Dans de nombreux cantons, ils ont récemment obtenu la suppression du droit de regard de la population. A Schaffhouse, Lucerne et Saint-Gall, la population n'a plus son mot à dire. Dans le canton de Zurich, le directeur des travaux publics a récemment déclaré qu'il considérait le droit de regard de la population comme «discutable sur le plan démocratique».

Allée près du parc éolien de Tramelan (BE), actuellement en
construction. (Photo Paysage Libre Suisse)

Peu de vent, beaucoup de subventions

Comment se fait-il que 1000 éoliennes soient prévues en Suisse, alors que le pays est beaucoup moins venteux que les régions côtières? Comment se fait-il qu'il n'y ait eu qu'un seul moulin à vent en Suisse, mais que le vent soit soudainement suffisant pour installer 1000 éoliennes dans notre paysage? L'explication est simple: ce n'est pas le vent qui a augmenté, mais depuis 2008, il existe des subventions extrêmement élevées qui rendent la construction d'éoliennes lucrative pour les compagnies d'électricité.

Des milliards de subventions pour les riches compagnies d'électricité

Si une compagnie d'électricité souhaite réaliser une éolienne, elle doit débourser environ 10 millions de francs. Entre 2008 et 2022, la Confédération a accordé des «engagements de rémunération» qui garantissent aux exploitants d'éoliennes des revenus d'environ 25 millions de francs sur une période de 20 ans. Le bénéfice garanti s'élève donc à 150%. Nous payons tous ces subventions via notre facture d'électricité, sous la forme d'un supplément sur chaque kilowattheure consommé. L'exploitant d'un parc éolien de 20 éoliennes doit donc investir 200 millions de francs, mais reçoit en contrepartie 500 millions de francs sur 20 ans. Cela représente un bénéfice garanti de 300 millions de francs. Les groupes électriques engrangent déjà des milliards grâce au commerce de l'électricité, sans que les consommateurs n'y participent.

Une activité lucrative sous couvert d'écologie

Depuis 2022, il n'y a plus de «promesses de rémunération», mais des «contributions d'investissement» uniques. La Confédération paiera à l'avenir 60% des investissements à partir du même pot que les «promesses de rémunération». Cela ne représente «que» 6 millions de francs par éolienne. L'exploitant peut toutefois vendre librement l'électricité sur le marché et conserver l'intégralité des recettes. Cela permet de générer plusieurs millions de francs supplémentaires, ce qui laisse à l'exploitant un bénéfice considérable.

L'exploitant n'aura jamais à rembourser les subventions fédérales. Il s'agit en quelque sorte d'un don gratuit de l'Etat suisse, financé par des prélèvements obligatoires auprès de la population. C'est la seule raison pour laquelle on parle des éoliennes en Suisse. Les grands groupes électriques et les investisseurs veulent en tirer des profits, tout en se donnant une image «verte».

Contribution négligeable à l'approvisionnement en électricité

Les éoliennes ne peuvent pas contribuer de manière significative à l'approvisionnement énergétique en Suisse. Actuellement, la consommation annuelle d'électricité en Suisse est d'environ 60 000 GWh (gigawattheures). Pendant la saison hivernale, plus froide, d'octobre à mars, elle est de 40 000 GWh. En raison de la numérisation, de l'électrification des transports, de l'installation de pompes à chaleur et de la construction de nouveaux centres de données, la consommation d'électricité devrait passer à 100 000 GWh par an, dont 60 000 GWh pendant la saison hivernale. Il manquera donc à l'avenir 20 000 GWh rien que pendant la saison hivernale. Avec la fermeture des centrales nucléaires d'ici 2040, il manquera 12 000 GWh supplémentaires pendant la saison hivernale. Il faudra donc rapidement 32 000 GWh pendant la saison hivernale pour couvrir notre consommation d'électricité. Or, en Suisse, les éoliennes ne produisent qu'environ 3 GWh par installation pendant la saison hivernale, avec un maximum de 4 GWh.

Cela signifie que pour couvrir les besoins, il faudrait construire près de 10 000 éoliennes en Suisse.

Pas de parcs éoliens dans les forêts et début des travaux de construction des éoliennes uniquement avec droit de veto préalable de la population concernée: Le comité d'initiative devant le Palais fédéral à Berne le 25 juillet 2025 lors du dépôt de l'initiative pour la protection des forêts et de l'initiative pour la protection des communes. (Photo Paysage Libre Suisse)

Bref portrait de «Paysage Libre Suisse»

L'association «Schweizerische Vereinigung Landschaft ohne Windkraft – Association suisse paysage sans éoliennes» a été fondée le 15 janvier 2004 et rebaptisée «Paysage Libre – Freie Landschaft» (https://www.paysage-libre.ch/) en 2011. L'association s'est fixé pour objectif de rassembler, de représenter et de coordonner au niveau national les personnes et les organisations qui s'engagent pour la protection de la nature, en particulier de la flore et de la faune, contre les interventions humaines et contre la dégradation du paysage par les éoliennes industrielles. Outre ses membres individuels, «Paysage Libre Suisse – Freie Landschaft Schweiz» compte actuellement environ 55 organisations membres de toute la Suisse, représentant plus de 5000 personnes. Elias Vogt préside l'association.
Vous souhaitez connaître différents points de vue sur l'énergie éolienne? Lisez «Völlig durch den Wind» [Complètement à la dérive] sur https://sichtweisenschweiz.ch/politik/voellig-durch-den-wind/

L'énergie éolienne est une goutte d'eau dans l'océan

Une augmentation maximale de 400 éoliennes en Suisse d'ici 2040 peut être considérée comme réaliste sur le plan technique et social. Même si cette expansion était mise en œuvre, la production d'électricité pendant la saison hivernale n'atteindrait que 1400 GWh. C'est une goutte d'eau dans l'océan. Si l'on compare le potentiel de l'énergie éolienne en Suisse à celui de l'énergie solaire, l'importance mineure de l'énergie éolienne devient encore plus évidente. En 2024, de nombreuses installations solaires auront été installées sur les toits des maisons. A elles seules, les toitures solaires construites en 2024 produiront 3000 GWh sur l'ensemble de l'année, dont un quart pendant la saison hivernale, soit 750 GWh. Le calcul est simple: en deux ans, la Suisse construira suffisamment d'installations solaires pour dépasser le potentiel total de l'énergie éolienne pendant la saison hivernale. Le potentiel de l'énergie éolienne est donc négligeable.

L'énergie solaire est beaucoup plus importante que l'énergie éolienne

Les installations solaires sur les toits des maisons ne nécessitent pas l'abattage d'arbres, ne bafouent pas les droits populaires, ne tuent pas d'oiseaux et ne produisent ni bruit ni ombre. De plus, les installations solaires produisent trois fois plus pendant la saison estivale qu'en hiver: cet énorme excédent peut être stocké et réutilisé en hiver. L'électricité est consommée sur place et la population devient moins dépendante du réseau électrique. L'énergie solaire a certes un faible rendement, mais avec plus de 100 000 GWh par an, elle présente un énorme potentiel. Il existe donc suffisamment d'alternatives pour renoncer aux éoliennes nuisibles dans les forêts et pour respecter le droit de regard de la population lors de la construction d'éoliennes.

Electricité instable

L'énergie éolienne produit une électricité instable et aléatoire. Les éoliennes ne peuvent être que désactivées, mais pas activées lorsque l'on en a besoin. L'efficacité des éoliennes en Suisse est en moyenne inférieure à 20%. L'électricité ne peut pas être stockée localement. L'affirmation souvent entendue selon laquelle les éoliennes pourraient alimenter des milliers de foyers est donc fausse. S'il n'y a pas de vent, il n'y a pas d'électricité produite à partir de l'énergie éolienne. D'autres centrales électriques doivent alors prendre le relais. Les centrales éoliennes sont même superflues, car leur remplacement nécessite une deuxième infrastructure.

Problème du démantèlement non résolu, forêt détruite à long terme

Comme le montre la situation en Allemagne, le démantèlement des éoliennes reste un problème non résolu. Les pales (en fibre de verre collée et en plastique) ne peuvent pas être recyclées, actuellement, elles doivent être broyées et incinérées dans des usines de traitement des déchets. Les socles en béton de 2500 tonnes par éolienne restent à jamais dans le sol. Dans les forêts, aucun grand arbre ne pourra plus y pousser. A cela s'ajoute le fait que les immenses surfaces de sol forestier, compactées par les lourds engins de chantier lors de la construction et du démantèlement, seront moins fertiles pendant plus de 100 ans.

Préserver et entretenir les valeurs suisses

Les dommages considérables que les éoliennes causeraient aux riverains, à la nature et au paysage sont sans commune mesure avec leur faible utilité. Les initiatives visant à protéger les forêts suisses et à garantir le droit de regard des communes souhaitent préserver la protection de la nature et la démocratie directe, qui ont fait leurs preuves depuis 150 ans. Il est important de protéger les piliers fondamentaux de la Suisse contre la cupidité des compagnies d'électricité: à savoir un paysage intact, une biodiversité riche et notre démocratie unique au monde!

* Elias Vogt, né en 1996, est entrepreneur et défenseur de l'environnement. Il est notamment propriétaire de l'hôtel Chasseral, propriétaire et directeur général de Vogt Office GmbH et président de «Freie Landschaft Schweiz» (Paysage Libre Suisse).

Source: https://sichtweisenschweiz.ch/politik/windkraftwerke-bringen-schweizer-waelder-und-demokratie-in-gefahr/, 14 septembre 2025.

(Traduction «Point de vue Suisse»)

Retour